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Le poète Arthur Rimbaud quitte la poésie pour la vivre en Islam

Dans l’immense royaume de la poésie, où les mots dansaient avec émotion et imagerie, un poète osa entreprendre un voyage qui redéfinirait son existence. Voici l’extraordinaire histoire d’Arthur Rimbaud, un poète qui abandonna les limites du vers pour embrasser les couleurs vibrantes de l’Islam.

Né au milieu de temps tumultueux, les premières années de Rimbaud furent marquées par l’abandon et le désir. Mais le destin avait un autre chemin en réserve pour lui, un chemin qui le mènerait à une découverte qui transformerait sa vie à jamais.

portrait arthur rimbaudAlors que Rimbaud explorait les affaires de son père, il tomba sur des traductions du Coran et des récits du séjour de son père en Algérie. La curiosité prit le dessus, et il se retrouva plongé dans les mots du texte sacré, cherchant réconfort et réponses dans son océan d’incertitudes.

L’exploration de l’Islam par Rimbaud allait au-delà d’une simple curiosité intellectuelle. Il plongea profondément dans les enseignements, se plongeant à maintes reprises dans le Coran tout au long de sa vie. Sa connaissance profonde devint une source d’inspiration, donnant vie à ses créations littéraires.

Harar, une ville pas comme les autres

C’est dans la mystique ville de Harar que la connexion de Rimbaud avec l’Islam atteindrait son apogée. Entouré d’une toile de culture vibrante, il embrassa la foi qu’il avait étudiée pendant des années. Sa sœur, à ses côtés lors de ses derniers instants, fut témoin de sa dévotion alors qu’il louait avec ferveur la générosité d’Allah.

Les poèmes de Rimbaud de cette période résonnent d’échos de l’Orient, où il parlait d’obéissance et de sagesse primitive trouvée dans les versets du Coran. Ses visions transformaient les usines en mosquées et l’amenèrent à explorer les royaumes du mystique et du divin.

Mais le voyage de Rimbaud ne se termina pas à Harar. Il retourna en Europe, portant avec lui les leçons apprises et la sagesse acquise de son immersion dans l’Islam. Cette expérience unique lui donne une nouvelle perspective sur la poésie et la vie, illuminant ses écrits d’une profondeur et d’une émotion inégalées.

Alors que les pages se remplissaient de mots et que l’encrier se vidait, Rimbaud donnait naissance à une poésie d’un genre nouveau. Une poésie imprégnée d’une émotion ardente, nourrie par la connaissance de l’Islam et embrassant l’humanité toute entière.

Les convictions religieuses du poète Arthur Rimbaud

Les convictions religieuses du poète Arthur Rimbaud sont interprétées différemment d’un biographe à un autre. Il a été éduqué par sa mère dans un environnement chrétien selon Robert Goffin. Son ami Delahaye, qui l’a connu qu’au début et à l’entame de sa vie, évoque un personnage athée, qui blasphémait lors de son dernier soupir. Mais le poète Verlaine, l’ayant connu tout au long de son existence, ne mentionne aucun athéisme de Rimbaud.

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Arthur Rimbaud, Harar 1883

Arthur Rimbaud, de son nom Jean Nicolas Arthur Rimbaud, est un écrivain et poète d’origine française, le plus talentueux et le plus précoce de sa génération. Il est né le 20 octobre 1854 à Charleville-Mézières en France. Ayant une enfance tumultueuse où son père abandonna le foyer familial alors qu’il n’était qu’un enfant, il se retrouva enfermé entouré des effets personnels de ce dernier.

D’après les nombreuses biographies, sa vie est divisée en trois parties distinctes: l’enfance, le poète et enfin le nomade.

L’expérience de Rimbaud avec l’islam

Le monde de l’islam a été d’une grande influence dans la vie de Rimbaud, ainsi que dans sa plume poétique et ses voyages, cette même influence l’a poussé à se convertir à l’islam lorsqu’il était mourant.

Tout a commencé après qu’il ait trouvé, parmi les affaires de son père absent, Frédéric, des traductions du livre du Coran ainsi que de nombreux articles sur son époque passée en Algérie quelques décennies en arrière, qui mentionnent à plusieurs reprises l’émir Abdelkader. Cette soif de réponse dans son océan d’incertitudes et les questions laissées par sa figure paternelle ont poussé la curiosité de Rimbaud fils à lire le Coran malgré son immaturité, mais aussi à l’image de sa figure paternelle, à s’intéresser, également, à l’émir. On peut voir cette inspiration dans un de ces vers en latin de son œuvre « Jugurtha ».

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Harar, vers 1900

Mais les lectures coraniques de Rimbaud ont été assez récurrentes, il ne s’est pas arrêté à une seule lecture, il l’a relu plusieurs fois, de ses quinze ans à ses trente ans. Ce qui lui a valu de nombreuses connaissances qui ont par la suite inspiré sa littérature.

Puis, lorsque Rimbaud s’en va pour Harar, ces connaissances en plus du temps passé dans cette ville musulmane, l’ont inspiré à se convertir à l’islam. Sa sœur, qui était près de lui lors de ses derniers moments, témoigne du dévouement de Rimbaud envers Allah en affirmant qu’il clamait à plusieurs reprises la générosité d’Allah, ce qui a poussé Malcolm de Chazal à confirmer que « Rimbaud au Harrar s’était converti à la foi musulmane et pratiquait ».

Les citations de Rimbaud en rapport avec l’islam

C’est durant la deuxième partie de sa vie de 1869 à 1874, où il s’est identifié en tant que poète, qu’il a fait de nombreuses références à l’islam dans ses poèmes. Parmi ces références:

« Bon ! Voici que mon esprit veut absolument se charger de tous les développements cruels qu’a subis l’esprit depuis la fin de l’Orient… Il en veut, mon esprit !

… Mes deux sous de raison sont finies ! – L’esprit est autorité, il veut que je sois en Occident. Il faudrait le faire taire pour conclure comme je voulais. J’envoyais au diable les palmes des martyrs, les rayons de l’art, l’orgueil des inventeurs, l’ardeur des pillards ; je retournais à l’Orient et à la sagesse première et éternelle. – Il paraît que c’est un rêve de paresse grossière ! Pourtant, je ne songeais guère au plaisir d’échapper aux souffrances modernes. Je n’avais pas en vue la sagesse bâtarde du Coran.» (L’impossible)

Dans ce petit extrait de son œuvre, il a invoqué à plusieurs reprises l’orient qu’il a décrit l’obéissance première. Puis il a cité le Coran après avoir mentionné une issue aux souffrances modernes qu’il ne pensait guère ressentir, jusqu’à avoir croisé la chasteté bâtarde du Coran.

Que représente cette sagesse pour Rimbaud ? On peut exprimer cela par les interprétations suivantes :

  • La première interprétation peut se faire philosophiquement, le texte coranique est largement redevable à la phase anti-islamique. Il est possible que Rimbaud indique par ce vers combien le savoir coranique doit à cette période dite d’ignorance.
  • Les renseignements qu’on pourrait aussi tirer de ces vers sont rattachés à la figure paternelle absente. En effet, Rimbaud fait l’acquisition de ce Coran à un jeune âge. C’est une conséquence de l’abandon d’un de ses parents, ce qui lui laissa un goût amer, il ne profite pas pleinement de ce savoir.
  • Pour finir, on peut déceler que Rimbaud cherche une sagesse sans limites, qu’il semble trouver dans la chasteté bâtarde du Coran.

« Je m’habituai à l’hallucination simple : je voyais très franchement une mosquée à la place d’une usine » (Alchimie du verbe)

De ce poème, on distingue l’interprétation de son hallucination par une mosquée. Cela démontre l’influence et la source d’inspiration que le Coran exerce sur le poète.

« Veut-on des chants nègres, des danses de houris ? Veut-on que je disparaisse, que je plonge à la recherche de l’anneau ? Veut-on ? Je ferai de l’or, des remèdes. » (Nuit de l’enfer)

« J’entre au vrai royaume des enfants de Cham. » (Mauvais sang)

Dans ces deux extraits, on retrouve des termes d’islam et d’orient, comme les houris, qui sont des femmes d’une beauté incomparable que retrouveront les musulmans une fois dans le paradis. Et aussi les enfants du Châm, ce qui représente les enfants des sociétés orientales.

Comme disent les musulmans, c’est écrit !

Coran personnel de Arthur Rimbaud
Coran personnel de Arthur Rimbaud

Après avoir abruptement abandonné la poésie, sa faim de découverte de cultures arabes et orientales le conduira loin de sa patrie; en Europe, en Asie, au Moyen-Orient et, finalement, en Afrique. L’auteur français en herbe arrive à Harar, en Éthiopie, en décembre 1880, après un voyage qui l’a conduit à traverser le golfe d’Aden dans un boutre en bois puis à traverser le désert de Somalie à cheval pendant vingt jours, il a vécu presque onze ans dans une région prospère de ce qui s’appelait, alors, Abyssinie. Certains disent qu’il était vendeur d’armes à cette époque.

Harar était, et est toujours, un marché avec des ruelles pavées escarpées serpentant entre d’imposants murs de calcaire et de tuf. Plus de 180 mosquées et sanctuaires, dont certains remontent au Xe siècle, se trouvent dans la vieille ville densément peuplée.

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Marché, Harar entre 1900 et 1920

Précédant cette ère, Harar fut un centre d’études musulman soufi conservateur sacré fermé aux étrangers depuis des centaines d’années. Rimbaud a exhorté ses employeurs du port arabe d’Aden à l’envoyer dès qu’il en a entendu parler.

Il a étudié l’arabe en 1874 et enseigné le Coran aux jeunes élèves de la région de Harar. « C’était un arabisant de premier ordre, et dans sa résidence là-bas, il aurait eu des conversations sur le Coran avec les anciens locaux […], a déclaré l’aventurier italien Ugo Ferrandi, qui a passé du temps avec lui en Afrique. Les habitants le considéraient comme un musulman. »

arthur rimbaud autoportraitL’intérêt de Rimbaud pour l’Islam n’avait pas que des raisons commerciales. Rimbaud a découvert dans l’islam une forme qui « allait de pair avec sa propre résignation » et « transformait son pessimisme morose en un haussement d’épaules de fatalisme. » Dans une lettre, Rimbaud déclarait : « Il est plus que probable que je n’atteindrai jamais la paix de l’esprit, que je ne vivrai ni ne mourrai en paix… Enfin, comme disent les musulmans, c’est écrit ! C’est la vie : ce n’est pas une affaire drôle ». Il était particulièrement séduit par l’idée que le destin était déjà « écrit », ajoutant : « Comme les musulmans, je sais que ce qui sera, et c’est tout. » Il était si dévoué à son surnom arabe, Abdo Rinbo, le Serviteur de Dieu, qu’il en fit graver un sceau.

« Quand il est venu ici, il était complètement différent », a déclaré Abdunasir Abdulahi, un Harari dont la grande tante a rencontré Rimbaud dans sa jeunesse. « Elle prétendait qu’il était de confession musulmane et qu’ils avaient l’habitude de jouer chez lui. » Les propos de quelques Hararis stipulent avoir entendu le poète dire « Allah Kerim » à plusieurs reprises dans les rues.

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Maison de Rimbaud, Harar

Il a été contraint de quitter Harar en 1891 pour se faire soigner, à la suite d’une agonie au genou qui était devenue intolérable. Mais il est trop tard lorsque son bateau arrive en France : il faut lui enlever le membre malin. De son lit d’hôpital à Marseille, le poète et aventurier a évoqué avec chaleur les histoires de son séjour dans son « cher Harar ». « J’espère y retourner… J’y vivrai toujours », exprime-t-il cet été-là.

Arthur Rimbaud meurt en novembre 1891, à l’âge de 37 ans.

En bref

Ces informations historiques nous permettent de mieux comprendre la vie de Rimbaud, ce qui leur vaut différentes interprétations. Certains érudits et philosophes pensaient qu’il cherchait à sauver son âme, d’autres affirment que c’était un arabisant qui cherchait à voir de nouveaux horizons et à se fondre dans la masse, en s’appropriant la culture et les traditions locales, enfin quelques-uns pensent qu’il se serait converti à l’islam et le pratiquait. Sa propre sœur déclare qu’Arthur invoquait, à plusieurs reprises « Allah Kerim ».

Références

    1. lemonde.fr
    2. nytimes.com
    3. romanischestudien.de
    4. jstor.org
    5. romanischestudien.de

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